Post Cuts

Du 3 avril 2014 au 24 mai 2014
Vernissage le jeudi 3 avril 2014
Depuis la fin des années 90, Roland Stratmann développe un travail artistique de performance, d’installation et de dessin. Souvent participative et ludique, son œuvre engage une dynamique d’échange dont elle invente les formes de réception. Le dessin, comme lieu de formation du regard et d’émergence de la forme, y tient une place centrale.

Dans le cadre de son exposition à la galerie laurent mueller, la formation des images passe par leur destruction préalable, un acte de coupure qui mène à de nouvelles constellations de sens. Dans sa série la plus récente, Post Cuts, Roland Stratmann a travaillé à partir de cartes postales à l’iconographie souvent pittoresque ou folklorique. Trois cartes assemblées sur leur tranche sont le point de départ d’un jeu de découpe, de recouvrement et d’inversion.

La série de dessins intitulée Spots peut être envisagée comme une réflexion sur le mal et sa banalisation médiatique. Dans un texte célèbre à ce sujet, Devant la douleur des autres, Susan Sontag écrit que voir des images horribles de façon répétée les rend moins réelles. Jacques Rancière ajoute : “Si l’horreur est banalisée, ce n’est pas parce que nous en voyons trop d’images. […] Mais nous voyons trop de corps sans nom, trop de corps incapables de nous renvoyer le regard que nous leur adressons […]”.

Roland Stratmann déjoue cette déréalisation de l’image en dissociant et en stratifiant son contenu. Des dessins réalisés à partir d’images de guerres et d’attentats trouvées sur Internet s’insèrent dans des compositions graphiques morcelées, sous l’apparence première d’éclaboussures rouge sang. Un dualisme se met en place entre le visible et l’irreprésentable, l’image et sa violence réelle soustraite aux regards. Leur composition stéréoscopique induit la recherche d’un point de vue situé à juste distance du sujet, entre les écueils de l’empathie aveuglante et de l’indifférence.

En contrepoint de cette série de dessins, l’installation Apnoia ponctue l’exposition d’un bruit entêtant provoqué par la pulsation de l’air dans des sacs formant des poumons artificiels. Leur caractère à la fois fantomatique et renvoyant au corps dans sa réalité concrète repose sur un dualisme similaire à celui des dessins : une jointure est créée entre l’observation précise d’un désastre et sa re-formation imaginaire. L’ensemble prend la forme d’une enquête, elle sollicite le visiteur à s’interroger sur  quoi penser et quoi faire de ce qu’il voit.



Roland Stratmann est né en 1964 à Borken-Weseke, Allemagne
Titulaire d’une Maîtrise de l’Universität der Künste Berlin et d’une formation de graphiste-imprimeur, il a entre autre exposé au Musée d’Art Contemporain d’Herzliya, Tel Aviv / Israel, au Centro de Artes Visuales/Museo del Barro, Asunction/Paraguay et au Palais de Glace, Buenos Aires/Argentina entre autres. Il est titulaire de nombreux prix et résidences dont le Prix National pour le Développement Urbain Intégré et l’Architecture en 2009. Un catalogue de ses dessins a été publié par le Stadtmuseum Borken et la galerie laurent mueller en 2011. Rancière. Jacques, 2009. Le spectateur émancipé. Paris : La fabrique éditions.